SUPERFLEX, un collectif d’artistes écologistes qui nous sensibilise aux changements climatiques

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Après l’architecte Dorte Mandrup, c’est au tour du collectif artistique danois SUPERFLEX d’être mis à l’honneur au Bicolore – Maison du Danemark à Paris dans l’exposition « There Is No Such Thing as Bad Weather ». Elle présente trois décennies du travail du collectif à travers quatre œuvres, toutes tournées vers les problématiques climatiques, vers la préservation des écosystèmes, vers le dialogue avec les autres espèces, vers la low-tech et la décroissance : quatre œuvres, trois artistes, trois décennies.

« Les changements climatiques, c’est la planète Terre qui parle aux humains. »

Les changements climatiques perçus par un trio d’artistes scientifiques écologistes

Le collectif danois star SUPERFLEX est fondé en 1993 par trois amis, Jakob Fenger, Bjørnstjerne Christiansen et Rasmus Rosengren Nielsen, qui chérissent l’esprit collectif et estiment que c’est la seule façon de créer qui puisse leur convenir. Dans l’émulation du groupe, la richesse des différents regards, l’individu est plein d’humilité. Ils font de l’art un lieu d’expérimentation en commun et non un appel intérieur individuel. Ce collectif danois aime d’ailleurs s’étendre dans la réalisation de ses projets et investir d’autres acteurs, artisans, ouvriers, ingénieurs, jardiniers, agriculteurs, scientifiques…

« Le rôle de l’artiste c’est de définir la culture. »

Ce sont des artistes scientifiques qui cultivent une obsession pour la montée des eaux due aux changements climatiques. Les réalisations présentées dans l’exposition sensibilisent à ces sujets écologiques très actuels. Elles pallient les manquements causés par les comportements humains mortifères en proposant des solutions, mettent en scène la beauté des fonds marins ou encore la catastrophe à laquelle nous courons avec la société de surconsommation dans laquelle nous vivons.

Une exposition qui nous sensibilise et change notre compréhension du monde

Dès le début du collectif dans les années 1990, quand les changements climatiques n’étaient pas encore considérés comme une urgence absolue, les trois artistes danois s’attachent à ce sujet. Ils créent des œuvres novatrices respectueuses de l’environnement, créatrices d’énergies saines voire de biodiversité et d’écosystèmes.

Les trois artistes, Jakob Fenger, Bjørnstjerne Christiansen et Rasmus Rosengren Nielsen, estiment que si les humains continuent sur leur lancée, les poissons vont devenir leurs voisins : il faut donc inévitablement mettre en place un dialogue avec eux afin que l’on puisse apprendre d’eux et vivre au mieux la montée inextricable des eaux. SUPERFLEX cherche à créer un dialogue interespèces qui sorte l’humain de sa posture hégémonique : l’humain ne peut plus décemment occuper le centre, il doit envisager, pour sa propre survie, toutes les autres espèces et les protéger, souvent de lui-même.

« Pour nous c’est ça l’art, changer de perspective. »

Des œuvres qui alertent sur le climat et changent nos perspectives

SUPERFLEX crée des œuvres qui alertent tout en proposant des solutions. La première création présentée dans l’exposition, Supergas, est créée entre 1997 et 2007. Il s’agit d’une création low-tech qui se présente sous la forme d’une grosse boule orange qui crée du biogaz à partir de matières organiques. Ce biogaz permet à une famille de s’éclairer et de cuisiner pour la journée et assure son auto-suffisance énergétique. C’est une création très avant-gardiste pour l’époque, quand on parle beaucoup aujourd’hui de sobriété énergétique et d’autosuffisance. Le projet a été réalisé en commun avec de nombreux acteurs et installé en Tanzanie, au Cambodge, en Thaïlande ou encore au Mexique. Le Supergas exposé est accompagné d’un diaporama qui retrace sur dix ans le chemin de ce projet.

SuperGas ©SUPERFLEX

Les trois autres œuvres sont tournées vers le sujet de la montée des eaux. La deuxième réalisation met en scène un McDonald’s inondé : le lieu est reproduit dans les moindres détails et on assiste en vidéo à la grande inondation d’un des symboles du capitalisme libéral et de la société de surconsommation. Flooded McDonald’s (2009) est une performance vidéo qui livre à la fois une vision apocalyptique et une mise en scène de l’inéluctable : à cause du modèle économique des grandes multinationales comme McDonald’s, le changement climatique s’aggrave et s’accélère. L’eau monte.

Flooded McDonald’s – Photo ©SUPERFLEX

La troisième performance, Vertical Migration (2021) nous place dans la peau d’un siphonophore, une créature sous-marine de la famille des méduses qui, comme les crevettes, remonte chaque nuit à la surface de l’eau afin de se nourrir, participant à la plus grande de toutes les migrations terrestres. SUPERFLEX a créé un siphonophore numérique pour que l’on vive cette migration intimement. Le spectateur est placé dans la peau d’une créature très étrangère mais avec laquelle il partage un destin migratoire vertical : les humains, avec la montée des eaux, devront eux aussi se déplacer vers le haut. On entre en dialogue avec la créature et on change radicalement de perspective en passant dans la peau du siphonophore.

Vertical Migration projeté sur le bâtiment des Nations Unies à New York, 2021 ©Lance Gerber

Enfin, la dernière œuvre exposée réinvente notre conception de l’urbanisme en tenant compte des besoins de nos futurs voisins : les poissons. As Close As We Get (2022) présente des structures composées de différents matériaux, pierres, briques servant d’habitats potentiels aux poissons. Elles ont été testées en milieu marin : l’expérimentation a été une réussite puisqu’un écosystème s’est recréé autour des structures. Il s’agit de sculptures utiles aux poissons et d’art sensibilisateur pour les humains.

As Close As We Get

L’exposition « There Is No Such Thing as Bad Weather » nous rappelle avec ingéniosité que, s’il y a du « bad weather », c’est collectivement de notre faute et que c’est à nous d’être inventifs pour réparer nos erreurs et préparer la suite au mieux. SUPERFLEX est un collectif connu de par le monde que le Bicolore s’attache à nous faire découvrir. SUPERFLEX expose également aux Galeries Lafayette des Champs Élysées, autre temple de la surconsommation contemporaine : l’œuvre Après vous, le Déluge montre par un pointillé bleu courant le long des murs du bâtiment le probable niveau des eaux au siècle prochain et invite symboliquement à revoir nos conduites collectives consuméristes.

SUPERFLEX nous parle de décroissance et nous sensibilise à l’écologie par l’art, comme de nombreux autres artistes dont Talivera parle dans l’article « Quand l’art nous questionne sur l’écologie et la décroissance« .

Exposition au Bicolore – Maison du Danemark (142 Avenue des Champs-Élysées 75008 Paris) jusqu’au 29 janvier 2023.

Cléo Ragasol

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