Zoom artiste : Tim Noble & Sue Webster, sculpteurs de déchets

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À l’époque de la consommation massive et de la production de déchets qu’elle entraîne, Talivera vous présente un couple d’artistes qui se sert habilement de cette matière polluante en la détournant.

À l’instar des grands couples d’artistes comme Christo et Jeanne-Claude, Robert et Sonia Delaunay, les Lalanne ou encore Gilbert & George, Tim Noble et Sue Webster bousculent le monde de l’art. Ceux que l’on surnomme « les enfants terribles de l’art » se jouent des codes en travaillant l’informe, mettant en avant des matériaux ignobles – au sens stricte de « non nobles » : les déchets. Matériau gratuit, ils n’ont qu’à se baisser pour le récolter. C’est cette gratuité qui a d’abord motivé leur démarche : sans le sous, ils ont commencé à agencer des déchets dans leur studio londonien. 

Un art de la provocation 

Le couple se rencontre dans les années 80 à Londres au cours de leurs études d’art. Leur crédo : la provocation. Ils viennent de la culture punk rock et prônent l’underground et le trash. On est d’ailleurs accueilli sur leur site par un « WELCOME MOTHERFUCKERS ». Ils peignent des autoportraits avec les pieds, moulent leurs anus et leurs tétons, créent des amas de sexes masculins dont l’ombre est un profil humain, utilisent des corps d’animaux morts dans leurs sculptures… ils sont hors normes et leurs œuvres choquent, font rire, font réfléchir.  

« Comment quelque chose de beau peut-il provenir de quelque chose d’aussi laid ? À partir de déchets, nous faisons de l’art. Chaque partie est une sculpture à part entière. » Tim Noble & Sue Webster

Faire du beau avec du laid : un art de la dualité

Leur art montre deux facettes : ils travaillent l’ombre et la lumière, l’abstrait et le figuratif, le beau et le laid. Ils créent des installations en néons (« Light sculptures ») et des projections en ombres chinoises (« Shadow sculptures »), jouent sur la dualité, le décalage et les niveaux de compréhension. 

Les œuvres qui me semblent les plus intéressantes sont celles qui jouent avec la lumière et l’ombre via la projection d’ombres chinoises, les « Shadow sculptures ». Dans ces œuvres, il y a toujours deux niveaux de compréhension : la sculpture, un assemblage de détritus qui semble hasardeux, repoussant, et son ombre, figurative, très réaliste, « belle ». D’autant plus belle qu’elle émerge, surprenante et inattendue, d’un chaos informe d’objets et de déchets. Le beau qui naît du laid. D’un côté, un assemblage repoussant de déchets, d’objets cassés, d’animaux empaillés ; de l’autre, une ombre humaine, paisible, poétique ou violente, souvent un autoportrait des artistes. Leurs œuvres représentent la dualité : le couple, leurs deux faces, les deux faces de laid et du beau, du déchet et de l’œuvre. Le jeu entre la sculpture informe et la sculpture d’ombre née de la projection lumineuse crée la surprise, prête à rire – ou à pleurer – questionne en tout cas. 

Un shadow art reconnu mondialement

Tim Noble & Sue Webster sont des artistes reconnus dans le monde de l’art. Leurs œuvres sont présentées dans les collections permanentes du Solomon R. Guggenheim Museum de New York, à la National Portrait Gallery de Londres ou encore au Arken Museum of Modern Art au Danemark. Ils ont reçu le Arken Art Prize en 2007 et ont été récompensés en 2009 par la Nottingham Trent University pour l’ensemble de leur œuvre. 

Tim Noble et Sue Webster, via leur humour et leur provocation, nous sensibilisent à des sujets liés à la mort et à la pollution. En exposant des déchets, ils leur donnent des contours humains et nous tendent un miroir.

Cléo Ragasol

Pour parcourir toute leur œuvre, rendez-vous sur leur site, vous ne serez pas déçus : Site des artistes :Tim Noble et Sue Webster

Photos mises en avant : Wild mood swings @ Tim Noble & Sue Webster

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