Le Norvégien Edvard Munch (1863 – 1944) est l’un des plus célèbres peintres scandinaves. Non seulement le peintre le plus adulé de Norvège, mais aussi l’un des artistes les plus célèbres de l’histoire de l’art mondialement grâce à son tableau Le Cri, personnage hurlant dans une mer de nuages aux couleurs apocalyptiques.
Alors qu’une grande exposition à Paris va débuter en septembre 2023 mettant à l’honneur le peintre Munch, Talivera vous invite à zoomer sur cet artiste qui a contribué à rendre l’art plus expressif !
Munch a livré une œuvre profondément biographique et l’une des plus singulières de la mouvance symboliste. Il excelle dans l’expressionnisme, ce courant, qui s’opposant à l’impressionnisme français, valorise la subjectivité du peintre plutôt que le réalisme, afin de provoquer une émotion chez le spectateur.
Une âme tourmentée
Edvard Munch se représentait généralement dans des œuvres expressionnistes et mélancoliques comme une âme tourmentée. Entre symbolisme en vogue et expressionnisme naissant, l’auteur du célèbre Cri est un peintre de l’âme et des émotions. Il aborde dans ses œuvres les thèmes attachés à la mort, l’angoisse et la douleur, avec plus de lyrisme que de réalisme.
Au début du XXe siècle, il souffrait de graves problèmes d’alcool et d’une maladie mentale, qui l’ont poussé à faire appel à un professionnel. Dépressif, Edvard Munch sombre dans l’alcoolisme et séjourne six mois en clinique à Copenhague.
Il écrit: « J’ai reçu en héritage deux des plus terribles ennemis de l’humanité : la tuberculose et la maladie mentale. La maladie, la folie et la mort étaient les anges noirs qui se sont penchés sur mon berceau ».
Munch ne puisait pas son inspiration uniquement dans ses paysages intérieurs tourmentés. Il s’inspirait également des magnifiques paysages qui l’entouraient, et on peut reconnaître les endroits où il a habité ou séjourné dans ses toiles.
Munch fut l’un des premiers postimpressionnistes en intégrant la représentation de l’homme dans ses émotions, s’opposant ainsi aux impressionnistes montrant des atmosphères paisibles. Munch écrit : « Les peintres ne représenteront plus de scènes d’intérieurs, l’homme lisant, la femme cousant, ils doivent peindre des hommes qui respirent, s’émeuvent et aiment ». Munch cherche à représenter le monde avec l’Homme au centre de celui-ci. Il démarre une série de tableaux dans cet esprit: La Frise de la Vie. L’une des pièces centrales est la Danse de la vie. Avant, il y a eu Le Cri qui est devenu le tableau le plus connu au monde après La Joconde.
Un expressionniste hors-pair
Dès les années 1890, Munch compose ses scènes en leur conférant une dimension théâtrale, du point de vue de l’importance qu’il donne à l’expression des visages, aux postures hiératiques de ses personnages ainsi qu’à la disposition de ses figures. Outre la relation entretenue avec le dramaturge August Strindberg au début des années 1890, Edvard Munch sera lié de près à la scène symboliste internationale.
Le thème de la femme revient régulièrement dans l’œuvre d’Edvard Munch. Le peintre a souvent représenté l’amour dans ses côtés conflictuels, peignant la femme comme un objet à la fois de désir mais aussi de répulsion, voire même de peur. Dans la mythologie de l’artiste, la question du désir de la femme occupe une place centrale, thème notamment développé dans son conte illustré, Alpha et Oméga de 1908, et dans nombre de ses toiles. L’œuvre de Munch explore la psyché humaine à l’ère moderne, en particulier les thèmes de la mortalité, de la solitude, de l’anxiété et de la dépression, avant de transiter vers le naturalisme symbolique avec une utilisation de couleurs riches et de scènes brutes.
On y découvrira que le peintre-graveur était aussi photographe et cinéaste amateur. Dès 1882, alors qu’il est encore étudiant, Munch aurait eu recours aux dispositifs de la camera obscura et de la camera lucida pour composer ses perspectives. En 1927, il s’essaye à de petits séquences cinématographiques. au cours d’un voyage en France en 1927, le peintre fait l’acquisition d’une petite caméra « Pathé-Baby », avec laquelle il réalise des séries de vues dont à peine plus de cinq minutes ont pu être conservées. Il y témoigne, à travers une succession de courtes scènes, tournées caméra au poing, de son intérêt pour la vie urbaine : mouvement de piétons, passage de tramway, femme au coin d’une rue, homme marchant devant la caméra… Enfin, il ne manque pas de revenir à son sujet de prédilection, l’apparition de sa propre image dans tout son caractère étrange et fascinant.
Il écrit: « L’art est la forme de l’image conçue à travers les nerfs de l’homme – son cœur – son cerveau – son œil. L’art est l’aspiration de l’homme à la cristallisation »
Dès le début Munch affirme une volonté d’expérimentation formelle et technique qui, par la suite, le mènera à des expériences étranges, comme d’exposer ses toiles aux intempéries, ou à des solutions novatrices comme l’usage de la toile brute ou du contreplaqué non préparé, l’introduction dans sa peinture d’images issues de photographies à double exposition créant des figures transparentes, d’images de films, ou bien encore, dans le domaine de la xylographie – où il excellera -, l’exploitation des effets dus au matériau, comme les veines du bois.
Postérité
Considéré comme un artiste dégénéré par les nazis qui ont envahi la Norvège, Edvard Munch meurt en 1944, après avoir pris soin de léguer son œuvre à la ville d’Oslo. Disparu à 80 ans, le peintre laisse derrière lui plus d’un millier de tableaux, dessins et sculptures. Son visage apparaît sur les billets de 1000 krones, dans la monnaie norvégienne.
Il aura fallu attendre 2002 pour qu’un musée, le High Museum of Art d’Atlanta, consacre exclusivement une exposition à son œuvre tardive. En 1991, le Musée d’Orsay organisait une grande exposition parisienne autour du rapport de l’artiste avec l’hexagone (Munch et la France), s’attachant en particulier à ses années parisiennes. A la rentrée de septembre 2022, le musée souhaite de nouveau proposer une plongée dans l’univers de l’artiste à travers une grande exposition en collaboration avec le musée Munch d’Oslo : Edvard Munch, « Un poème d’amour, de vie et de mort ».
Plus d’infos sur son parcours
Munch est né le 12 décembre 1863 à Adalsbruk en Norvège dans les environs d’Oslo (qui portait le nom de Christiania jusqu’en 1925), mais a passé son enfance dans la capitale, où ses parents se sont installés. Il est élevé par sa tante qui l’encourage à développer ses prédispositions au dessin. Edvard Munch voulait à l’origine devenir architecte. L’artiste a quitté ses études d’architecture à l’Université technique de Kristiania (aujourd’hui Oslo) après seulement un an, afin de poursuivre sa nouvelle aspiration professionnelle, la peinture. Le désir de devenir artiste chevillé au cœur, il commence à se former à l’École royale de dessin, après avoir renoncé à une carrière d’ingénieur.
En 1884, il se mêle au mouvement artistique et littéraire de la Bohème de Kristiania, prenant de plus en plus distance avec le naturalisme. La vingtaine atteinte, il voyage à travers l’Europe, séjournant à Berlin et à Paris grâce à une bourse. Dans la capitale française, il découvre les post-impressionnistes, en particulier les œuvres de Paul Gauguin et de Vincent Van Gogh qui le marquent. Aux côtés du naturaliste Christian Krohg, Edvard Munch développe son talent pour le réalisme français. À l’automne 1889, Munch revient à Paris, où il suit les cours dans l’atelier de Léon Bonnat jusqu’en janvier 1890. C’est notamment Paul Gauguin qui le mena à adopter une position antiréaliste : le peintre français disait en effet que « l’art est le résultat de l’homme et non une imitation de la nature ».
Au cours de l’été 1891 qu’il passe dans sa maison d’Åsgårdstrand, il peint Mélancolie, considéré comme le premier tableau symboliste norvégien. En 1892, il participe à une exposition à Berlin où ses œuvres feront littéralement scandales ! Il est considéré comme un artiste anarchiste ! Il y aura même des protestations suite à cette exposition ! Mais grâce à cette controverse, il se fait un nom.
En 1909, la Nasjonalgalleriet organise une exposition à Oslo comprenant une centaine d’œuvres d’Edvard Munch. Puis en 1912, l’Exposition internationale du Sonderbund à Cologne, en Allemagne, consacre aux œuvres de Munch une salle entière. Entre 1914 et 1917, l’artiste réalisa un projet exceptionnel pour la ville d’Oslo : il peignit d’immenses fresques pour la salle des fêtes de l’Université d’Oslo. Pendant la Grande Guerre, Munch revient se fixer non loin d’Oslo. Il acquiert, en 1916, une propriété à Skøyen, qui devient sa résidence et son atelier. Dans cet environnement, Munch se consacre à la peinture de paysage.
Tantôt considéré comme une figure majeure du postimpressionnisme, tantôt considéré comme le père du symbolisme, Edvard Munch fut le pionnier du mouvement expressionniste en peinture au XXème siècle.
🖼Peinture mise en avant : Détail – Le chêne – Edvard Munch (1906)
Ping : Edvard Munch : vie, amour et mort au musée d’Orsay